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Patrick Modiano
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«Pour la première fois depuis quinze ans, le nom de cette femme lui occupait l'esprit, et ce nom entraînerait à sa suite, certainement, le souvenir d'autres personnes qu'il avait vues autour d'elle, dans la maison de la rue du Docteur-Kurzenne. Jusque-là, sa mémoire concernant ces personnes avait traversé une longue période d'hibernation, mais voilà, c'était fini, les fantômes ne craignaient pas de réapparaître au grand jour. Qui sait ? Dans les années suivantes, ils se rappelleraient encore à son bon souvenir, à la manière des maîtres chanteurs. Et, ne pouvant revivre le passé pour le corriger, le meilleur moyen de les rendre définitivement inoffensifs et de les tenir à distance, ce serait de les métamorphoser en personnages de roman.»
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« J'ignorerai toujours à quoi elle passait ses journées, où elle se cachait, en compagnie de qui elle se trouvait pendant les mois d'hiver de sa première fugue et au cours des quelques semaines de printemps où elle s'est échappée à nouveau. C'est là son secret. Un pauvre et précieux secret que les bourreaux, les ordonnances, les autorités dites d'occupation, le Dépôt, les casernes, les camps, l'Histoire, le temps - tout ce qui vous souille et vous détruit - n'auront pas pu lui voler. »
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«La danseuse arrivait, le matin, à sept heures quarante-cinq, gare du Nord. Ensuite le métro jusqu'à la place de Clichy. Le bâtiment du studio Wacker était vétuste. Au rez-de-chaussée, une dizaine de pianos d'occasion, rangés en désordre comme dans un dépôt. Aux étages, une sorte de cantine avec un bar et les studios de danse. Elle prenait des cours avec Boris Kniaseff, un Russe que l'on considérait comme l'un des meilleurs professeurs... Une odeur particulière de vieux bois, de lavande et de sueur.»
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Paris des jours et des nuits : Romans
Patrick Modiano
- Gallimard
- Quarto
- 26 Septembre 2024
- 9782072948749
Son art de la déambulation, depuis son adolescence, a permis à Patrick Modiano de nouer une relation fusionnelle avec Paris. Lui seul sait en explorer le passé, l'atmosphère et les détails d'époques révolues. Plus qu'une toile de fond à ses romans, sa passion quasi obsessionnelle pour les lieux, les rues, les annuaires, les quartiers, l'a poussé à faire de la capitale un personnage omniprésent, un élément central de son identité littéraire. Sans chercher à tout prix à livrer un Paris vrai, véritable, conforme à ce qu'il a été, il écrit un Paris rêvé, dont les traces évanescentes ne subsistent que dans sa mémoire. Des photographies placées en tête du volume, accompagnées des mots de l'écrivain, émergent une topographie personnelle, une géographie intime des lieux parisiens calquées sur les souvenirs qu'il s'en est faits entre 1953 et 1972. De son premier roman, La Place de l'Étoile (1968) jusqu'à La Danseuse (2023), aux confins de la réalité vécue, remémorée et distordue, et du rêve, du matériel et de l'immatériel, du palpable et de l'insaisissable, le chemin emprunté par l'auteur révèle à quel point autobiographie et géographie réinventées nourrissent aujourd'hui encore son écriture, même après l'effacement des lieux. Aux neuf romans retenus pour la présente édition, parus entre 1982 et 2019, s'ajoute un récit inédit, Brassaï de la nuit. Dans un dialogue établi entre texte et images, vision doublement sublimée de Paris, Patrick Modiano revient sur le travail du photographe d'origine hongroise, ce «poète qui transmettrait très loin dans le temps les visages [des mauvais garçons] et les lumières noires et blanches de Paris». Derrière les tableaux brossés par le Prix Nobel de littérature 2014, demeurent à jamais le Paris de sa jeunesse et ses territoires fantomatiques.
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«Et parmi toutes ces pages blanches et vides, je ne pouvais détacher les yeux de la phrase qui chaque fois me surprenait quand je feuilletais l'agenda : "Si j'avais su..." On aurait dit une voix qui rompait le silence, quelqu'un qui aurait voulu vous faire une confidence, mais y avait renoncé ou n'en avait pas eu le temps.»
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Qui pousse un certain Guy Roland, employé d'une agence de police privée que dirige un baron balte, à partir à la recherche d'un inconnu, disparu depuis longtemps ? Le besoin de se retrouver lui-même après des années d'amnésie ? Au cours de sa recherche, il recueille des bribes de la vie de cet homme qui était peut-être lui et à qui, de toute façon, il finit par s'identifier. Comme dans un dernier tour de manège, passent les témoins de la jeunesse de ce Pedro Mc Evoy, les seuls qui pourraient le reconnaître : Hélène Coudreuse, Fredy Howard de Luz, Gay Orlow, Dédé Wildmer, Scouffi, Rubirosa, Sonachitzé, d'autres encore, aux noms et aux passeports compliqués, qui font que ce livre pourrait être l'intrusion des âmes errantes dans le roman policier.
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«J'écris ces pages comme on rédige un constat ou un curriculum vitae, à titre documentaire et sans doute pour en finir avec une vie qui n'était pas la mienne. Les événements que j'évoquerai jusqu'à ma vingt et unième année, je les ai vécus en transparence - ce procédé qui consiste à faire défiler en arrière-plan des paysages, alors que les acteurs restent immobiles sur un plateau de studio. Je voudrais traduire cette impression que beaucoup d'autres ont ressentie avant moi : tout défilait en transparence et je ne pouvais pas encore vivre ma vie.»
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«Encore aujourd'hui, il m'arrive d'entendre, le soir, une voix qui m'appelle par mon prénom, dans la rue. Une voix rauque. Elle traîne un peu sur les syllabes et je la reconnais tout de suite : la voix de Louki. Je me retourne, mais il n'y a personne. Pas seulement le soir, mais au creux de ces après-midi d'été où vous ne savez plus très bien en quelle année vous êtes. Tout va recommencer comme avant. Les mêmes jours, les mêmes nuits, les mêmes lieux, les mêmes rencontres. L'Éternel Retour.» Patrick Modiano.
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En exergue de cet étonnant récit, une histoire juive : «Au mois de juin 1942, un officier allemand s'avance vers un jeune homme et lui dit : Pardon, monsieur, où se trouve la place de l'Étoile ? Le jeune homme désigne le côté gauche de sa poitrine.» Voici, annoncé en quelques lignes, ce qui anime le roman : l'inguérissable blessure raciale. À travers le narrateur, Raphaël Schlemilovitch, en trajets délirants, mille existences qui pourraient être les siennes passent et repassent dans une émouvante fantasmagorie. Mille identités contradictoires le soumettent au mouvement de la folie verbale où la tragédie la plus douloureuse se dissimule sous la bouffonnerie. Ainsi voyons-nous défiler des personnages réels ou fictifs : Maurice Sachs et Otto Abetz, Lévy-Vendôme et le docteur Louis-Ferdinand Bardamu, Marcel Proust et les tueurs de la Gestapo française, le capitaine Dreyfus et les amiraux pétainistes, Freud, Rebecca, Hitler, Eva Braun et tant d'autres, comparables à des figures de carrousels tournant follement dans l'espace et le temps.
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Souvenirs dormants suit la trace de six femmes que Patrick Modiano a rencontrées puis perdues de vue, autour du début des années 60. La première et la deuxième sont des prétextes de fugue, pour échapper à la tutelle de ses parents. La troisième se prénomme Geneviève Dalame. Elle appartient au milieu ésotérique et lui fait rencontrer Madeleine Péraud et Madame Hubersen qui fréquentent les mêmes cercles. Des trois, celle qui le marquera le plus est Geneviève Dalame, la « somnambule », qui semblait marcher à « côté de sa vie ». C'est d'ailleurs la seule qu'il retrouve, six ans plus tard, au détour d'une rue, accompagnée d'un enfant. Le cas de la dernière, dont il tait le nom, est différent. Il l'a vue tirer sur un homme dans une soirée, et s'est rendu complice d'elle en jetant son arme et lui servant de couverture pendant une sorte de cavale de plusieurs semaines. L'inquiétude d'une arrestation ne le quittera pas jusqu'à ce qu'il la recroise, vingt ans après, aux Buttes Chaumont.
Parfaite illustration de « cet art de la mémoire » qui lui a valu le prix Nobel de littérature, Souvenirs dormants peut se lire comme un roman d'apprentissage, une éducation sentimentale, un précis sur le souvenir, un mystérieux traité d'ésotérisme. Un livre magnifique porté par une méditation troublante sur la répétition, les « éternels retours » dans la vie et l'écriture.
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Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier
Patrick Modiano
- Folio
- Folio
- 11 Février 2016
- 9782070468270
« - Et l'enfant? demanda Daragane. Vous avez eu des nouvelles de l'enfant?
- Aucune. Je me suis souvent demandé ce qu'il était devenu... Quel drôle de départ dans la vie...
- Ils l'avaient certainement inscrit à une école...
- Oui. À l'école de la Forêt, rue de Beuvron. Je me souviens avoir écrit un mot pour justifier son absence à cause d'une grippe.
- Et à l'école de la Forêt, on pourrait peut-être trouver une trace de son passage...
- Non, malheureusement. Ils ont détruit l'école de la Forêt il y a deux ans. C'était une toute petite école, vous savez...»
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Nouvelle édition sous étui illustré en 2020
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Un été des années soixante. Une petite ville française au bord d'un lac, près de la Suisse. Victor Chmara a dix-huit ans et se cache parce qu'il a peur. D'étranges personnages hantent cette ville d'eau, comme ce docteur que l'on surnomme La Reine Astrid... Mais il y a surtout Yvonne, avec son dogue allemand... Une recherche du temps perdu.
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Comment devenir traître, comment ne pas l'être? C'est la question que se pose le héros du récit qui travaille en même temps pour la Gestapo française et pour un réseau de résistance. Cette quête angoissée le conduit au martyre, seule échappatoire possible.Par ce livre étonnant, tendre et cruel, Modiano tente d'exorciser le passé qu'il n'a pas vécu. Il réveille les morts et les entraîne au son d'une musique haletante, dans la plus fantastique ronde de nuit.
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« "Quand j'avais sept ans, on m'appelait la Petite Bijou." Il a souri. Il trouvait certainement cela charmant et tendre pour une petite fille. Lui aussi, j'en étais sûre, sa maman lui avait donné un surnom qu'elle lui murmurait à l'oreille, le soir, avant de l'embrasser. Patoche. Pinky. Poulou.
"Ce n'est pas ce que vous croyez, lui ai-je dit. Moi, c'était mon nom d'artiste." »
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"Qu'est-ce que tu dirais si j'avais tué quelqu'un?" J'ai cru qu'elle plaisantait ou qu'elle m'avait posé cette question à cause des romans policiers qu'elle avait l'habitude de lire. C'était d'ailleurs sa seule lecture...
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Dans un Paris où ils sont livrés à eux-mêmes, deux très jeunes gens, Odile et Louis, font l'«apprentissage de la ville» et d'une vie de hasards, d'expédients et d'aventures. Ils ont pour eux leur innocence et croisent sur leur route des individus singuliers, émouvants mais quelquefois peu recommandables qui les entraînent dans des chemins de traverse. Mais, en définitive, aussi trouble et aussi chaotique que soit un début dans la vie, il se métamorphose, avec le temps, en un beau souvenir de jeunesse, que les deux héros de ce livre sont désormais seuls à partager.
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«Je suis tombé sur la vieille coupure de journal qui datait de l'hiver où Ingrid avait rencontré Rigaud. C'était Ingrid qui me l'avait donnée la dernière fois que je l'avais vue. Pendant le dîner, elle avait commencé à me parler de toute cette époque, et elle avait sorti de son sac un portefeuille en crocodile, et de ce portefeuille la coupure de journal soigneusement pliée, qu'elle avait gardée sur elle pendant toutes ces années. Je me souviens qu'elle s'était tue à ce moment-là et que son regard prenait une drôle d'expression, comme si elle voulait me transmettre un fardeau qui lui avait pesé depuis longtemps ou qu'elle devinait que moi aussi, plus tard, je partirais à sa recherche.C'était un tout petit entrefilet parmi les autres annonces, les demandes et les offres d'emplois, la rubrique des transactions immobilières et commerciales : On recherche une jeune fille, Ingrid Teyrsen, seize ans, 1,60 m, visage ovale, yeux gris, manteau sport brun, pull-over bleu clair, jupe et chapeau beiges, chaussures sport noires. Adresser toutes indications à M. Teyrsen, 39 bis boulevard Ornano, Paris.»
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Comme son papa, Catherine Certitude porte des lunettes. Et comme sa maman qui vit à New York, elle aimerait devenir une grande danseuse. Contrainte d'enlever ses lunettes pour danser, Catherine découvre l'avantage de pouvoir vivre dans deux mondes différents : le monde réel, tel qu'elle le voit quand elle les porte, et un monde plein de douceur, flou et sans aspérité quand elle les ôte. Un monde où elle danse comme dans un rêve...
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Le narrateur part à la recherche de son père. Le voici dans un village, en bordure de la forêt de Fontainebleau, du temps de l'occupation, au milieu d'individus troubles. Qui est ce père ? Trafiquant ? Juif traqué ? Pourquoi se trouve-t-il parmi ces gens ? Jusqu'au bout le narrateur poursuivra ce père fantomatique. Avec tendresse.
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Quatorze récits où l'autobiographie se mêle aux souvenirs imaginaires. L'auteur peint aussi bien une soirée de l'ex-roi Farouk que son père traqué par la Gestapo, les débuts de sa mère, girl dans un music-hall d'Anvers, les personnages équivoques dont le couple est entouré, son adolescence, et enfin quelques tableaux de son propre foyer. Tout cela crée peu à peu un «livret de famille».
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Un dimanche de juillet, Ambrose Guise arrive à Paris. Personne. Sauf les statues. Une ville fantôme, lui semble-t-il, après un bombardement et l'exode de ses habitants. Auteur de romans policiers anglais, il vient rencontrer son éditeur japonais. Mais il va profiter de ce voyage pour élucider les mystères de son passé, du temps où il était français et s'appelait Jean Dekker, il y a vingt ans. Il fait alors surgir dans un Paris crépusculaire, halluciné, des lieux étranges : une chambre secrète rue de Courcelles, en face d'une pagode ; un grand rez-de-chaussée donnant sur un jardin, place de l'Alma. Il réveille les spectres de Georges Maillot, au volant de sa voiture blanche, de Carmen Blin, Ghita Wattier, des Hayward... Tout un quartier perdu de la mémoire est ainsi revisité, et délivre le secret de ses charmes, et de ses sortilèges.
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Pourquoi le narrateur a-t-il fui les bords de la Marne avec Sylvia pour se cacher à Nice ? D'où vient le diamant la Croix du Sud, la seule chose dure et consistante de leur vie et qui, peut-être, leur porte malheur ? De quoi est mort l'acteur populaire Aimos ? Qui sont les Neal, et pourquoi, de leur villa délabrée, s'intéressent-ils de si près à Sylvia, au narrateur, à la Croix du Sud ? Et Sylvia ? A-t-elle été l'épouse de Villecourt ? Et Villecourt ? Que vient-il faire à Nice, lui aussi, à l'heure de sa déchéance ?... À travers toutes ces énigmes qui s'entrecroisent, un roman d'amour se dessine, empreint d'un charme qui hante le lecteur pendant longtemps.
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«Quelle structure familiale avez-vous connue ? J'avais répondu : aucune. Gardez-vous une image forte de votre père et de votre mère ? J'avais répondu : nébuleuse. Vous jugez-vous comme un bon fils (ou fille) ? Je n'ai jamais été un fils. Dans les études que vous avez entreprises, cherchez-vous à conserver l'estime de vos parents et à vous conformer à votre milieu social ? Pas d'études. Pas de parents. Pas de milieu social. Préférez-vous faire la révolution ou contempler un beau paysage ? Contempler un beau paysage. Que préférez-vous ? La profondeur du tourment ou la légèreté du bonheur ? La légèreté du bonheur. Voulez-vous changer la vie ou bien retrouver une harmonie perdue ? Retrouver une harmonie perdue.»